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mercredi 10 mai 2006

La promesse de l'ange

La promesse de l'ange
Auteurs : Frédéric Lenoir, Violette Cabesos

Texte de présentation

Rocher battu par les tempêtes, lieu de cultes primitifs sanctifié par les premiers chrétiens, le Mont-Saint-Michel est loin d'avoir révélé tous ses secrets. Au début du XIe siècle, les bâtisseurs de cathédrales y érigèrent en l'honneur de l'Archange, prince des armées célestes et conducteur des âmes dans l'au-delà, une grande abbaye romane.
Mille ans plus tard, une jeune archéologue passionnée par le Moyen Âge se retrouve prisonnière d'une énigme où le passé et le présent se rejoignent étrangement.
Meurtres inexpliqués, amours périlleuses, secrets millénaires... sur le chemin du temps, de la passion, de l'absolu, la quête de Johanna la conduit inexorablement aux frontières d'un monde dont on ne revient pas indemne.

Prix des Maisons de la Presse 2004.

Mon avis : Très Bien

Deux auteurs complémentaires
Construit autour d'une intrigue qui se déploie alternativement sur deux siècles, aux XIe et XXIe siècles, La Promesse de l'ange est le fruit de la collaboration entre Frédéric Lenoir, entre autres philosophe, sociologue et historien des religions, et Violette Cabesos, romancière.

Une intrigue mêlant passé et présent
XIe siècle. Frère Roman, moine bénédictin, est chargé de la construction du sanctuaire destiné à honorer l'archange saint Michel sur le mont Tombe, ancien lieu de culte celte. Mais sa rencontre avec Moïra, jeune chrétienne fidèle aux croyances celtes de ses ancêtres, va bouleverser sa vie et faire peser sur lui une malédiction le poursuivant jusqu'à nos jours.
Dix siècles plus tard. Johanna, jeune archéologue médiéviste participant à un chantier de fouilles à l'abbaye de Cluny, est hantée depuis son enfance par un rêve étrange impliquant un moine décapité qui lui dit : Ad accedendum ad caelum, terram fodere opportet ("Il faut fouiller la terre pour accéder au ciel"). Lors d'un séjour au Mont-Saint-Michel, elle se rend compte que ce rêve, qui a débuté lorsqu'enfant elle a visité ce lieu saint avec ses parents, est lié à l'histoire du Mont-Saint-Michel. Grâce à un concours de circonstances, elle prend la direction du chantier de fouilles du Mont-Saint-Michel, bien décidée à découvrir ses secrets et à trouver une explication à son rêve.
Deux histoires à deux périodes différentes mais qui se rejoignent progressivement dans un rythme qui s'accélère de plus en plus au fil des pages jusqu'au dénouement final...

Une intrigue conçue comme un jeu de piste archéologique
L'intrigue, mêlant passé et présent, est bien construite et maîtrisée, notamment par la présence de chapitres longs permettant au lecteur de bien s'imprégner de l'atmosphère de chaque époque. Certes, le récit met un peu de temps à se mettre en place, mais ce démarrage un peu long se justifie par la nécessité de bien poser les fondations de ce thriller qui repose sur l'histoire riche et complexe du Mont-Saint-Michel (lieu sacré pour les Celtes, puis pour les chrétiens). Ensuite, ce roman devient véritablement captivant et nous tient en haleine jusqu'au bout, la tension et le rythme allant crescendo. Le climat qui règne tout au long de ce roman, fait à la fois d'ombre et de lumière, n'est pas pour rien dans le fait qu'on n'arrive plus à le lâcher : on est littéralement sur le Mont-Saint-Michel, où règne le mystère, le silence, la pénombre, bien loin des boutiques de souvenirs et des buvettes touristiques… bref, une atmosphère improbable de nos jours !

Un thriller savant
La grande force de ce roman est qu'il fourmille d'informations sur l'histoire du Mont-Saint-Michel, les rites et croyances celtes, l'archéologie, l'architecture, la vie des moines au Moyen Âge, la technique des bâtisseurs de cathédrales... Les férus d'histoire ne pourront qu'apprécier !
Personnellement, j'ai adoré la discussion entre Johanna et Patrick à propos de la symbolique dans l'art roman et gothique, sur la révolution apportée par l'arc brisé (pages 248 et 249)... : c'est passionnant et brillant ! Sans oublier que l'exposé intéressant sur l'origine de l'arc brisé, inventé en Orient au Xe siècle (Syrie et Arménie), et ramené en Europe par les premiers croisés autour de 1099/1100. Ainsi, le premier exemple connu de l'arc brisé se situe à Cluny.
J'ai également beaucoup appris sur la vie quotidienne dans les monastères, l'organisation cléricale de cette époque, la structure de Cluny et du Mont-Saint-Michel, l'organisation des travaux et des différents corps de métiers (parliers chargés de traduire les différents dialectes, morteliers couvreurs, forgerons, fresquistes, verrier, manoeuvres, hommes de peine, porteurs de pierre ou d'eau, tâcheron...) et de la journée d'un moine.
J'ai notamment découvert que l'art roman n'a été baptisé ainsi qu'en 1818, par un archéologue normand, Charles Duhérissier de Gerville, en référence à la langue romane usitée au Moyen Âge par le peuple, la rustica romana lingua, qui était la variante parlée du latin. Auparavant, toutes les constructions médiévales étaient qualifiées de "gothiques". Mais aussi les liens qui existaient entre les monastères bénédictins anglais et français : lors des persécutions de Henri VIII et Elizabeth Ire puis de la suppression des ordres monastiques à la Révolution, les religieux se sont exilés, selon la période, en France ou en Angleterre..
En revanche, cette qualité peut aussi se révéler être un défaut pour le lecteur peu familier de l'histoire et de l'art du Moyen Âge, surtout s'il recherche uniquement de l'action. En effet, les descriptions historiques peuvent parfois gêner le lecteur dans la progression du récit. Mais les auteurs ont réussi à mêler de façon remarquable l'histoire et le romanesque, donc tout le monde peut y trouver son compte.

Une impression de déséquilibre entre les deux périodes

Un bémol toutefois sur le rendu inégal entre les deux périodes : autant les personnages de l'époque de Roman sont fouillés, complexes et ont du relief, autant ceux de l'époque de Johanna sont stéréotypés et insipides : une héroïne fragile mais tout de même forte ; Isabelle, la meilleure amie, mère de famille ; François, l'amant attaché mais distant ; l'archéologue homosexuel dépressif, l'archéologue éternel adolescent... De la même manière, si les pages décrivant l'amour impossible qui lie Roman et Moïra, sont magnifiques – on ressent la souffrance des personnages tiraillés entre leurs désirs et leur culpabilité –, autant les amours de Johanna semblent superficielles et inintéressantes. Est-ce une marque de la superficialité de nos temps ?!

Pour résumer : un thriller historique mêlant adroitement contenu historique, intrigue policière, suspense, romantisme… À conseiller à tous les amateurs d'histoire !
Un conseil : prenez la précaution d'avoir la suite, La Parole perdue, sous la main, car ce volume s'arrête sur une fin ouverte, à savoir sur une route qui se sépare en deux voies distinctes... quelle voie suivra l'héroïne ?

L'avis des blogueurs

Ballades au fil de l'eau...

Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : Le Livre de poche
Date de parution : mai 2006
Couverture : brochée
Format : 11 cm x 18 cm
Pagination : 640 pages
ISBN : 978-2-2531-1656-1

Livre numérique

Éditeur : Albin Michel
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