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mercredi 28 février 2018

Les indésirables

Les indésirables
Autrice : Diane Ducret

Texte de présentation

Un cabaret dans un camp au milieu des Pyrénées, au début de la Seconde Guerre mondiale. Deux amies, l'une aryenne, l'autre juive, qui chantent l'amour et la liberté en allemand, en yiddish, en français... cela semble inventé ! C'est pourtant bien réel. Eva et Lise font partie des milliers de femmes "indésirables" internées par l'État français. Leur pacte secret les lie à Suzanne "la goulue", Ernesto l'Espagnol ou encore au commandant Davergne.
À Gurs, l'ombre de la guerre plane au-dessus des montagnes, le temps est compté. Il faut aimer, chanter, danser plus fort, pour rire au nez de la barbarie. À la façon d'une comédie dramatique, Diane Ducret met en scène le miracle de l'amour, la résistance de l'espoir dans une fable terrible et gaie, inspirée d'histoires vraies.

Mon avis : Coup de coeur !


Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : J'ai lu
Date de parution : février 2018
Couverture : brochée
Format : 11 cm x 17,8 cm
Pagination : 349 pages
ISBN : 978-2-2901-5082-5

Livre numérique

Éditeur : Flammarion
Format : 7switch : ePub –– Amazon : Kindle –– Decitre : ePub ou PDF –– ePagine : ePub –– Fnac : ePub –– Numilog : ePub ou PDF

jeudi 16 mars 2017

Moi, Hélène la maudite

Moi, Hélène la maudite
Autrice : Amandine Marshall

Texte de présentation

Maudite ? Je le fus bien avant ma naissance... Je songe avec plus d'amertume que de colère aux deux êtres qui n'eurent de cesse de me rendre esclave d'un destin que je n'ai jamais souhaité : Tyndare, roi de Sparte, mon père adoptif, et Aphrodite, la plus belle d'entre les déesses… ma demi-soeur.
Qu'aurait été ma vie sans eux ? Je l'ignore, bien que je me sois souvent prise à rêver de cette autre vie, une vie sans honte, sans culpabilité, sans milliers de morts, qui eux aussi, me maudissent par-delà l'éternité.
Ce que je vais te révéler a été oublié dans la nuit des temps : bien avant ma naissance, Tyndare se fâcha avec Aphrodite et entoura la statue de la déesse de lourdes chaînes. Cet acte signa à jamais le malheur de ma famille. Aphrodite vengea l'affront, mais Tyndare n'apprit que bien plus tard la punition dont la déesse l'avait frappé, dont elle nous avait tous frappés...

Mon avis : Coup de coeur !

Hélène... l'évocation de ce prénom ne laisse personne indifférent. Hélène, mais oui, bien sûr, la plus belle femme du monde, cette séductrice responsable de la guerre de Troie ! Hum, en êtes-vous si sûr ?

L'auteur
Docteur en égyptologie, archéologue et historienne, Amandine Marshall a écrit ce roman, Moi, Hélène la maudite, alors qu'elle participait à des fouilles archéologiques sur l'île grecque de Thasos, il y a de cela une petite dizaine d'années… En effet, après avoir essuyé plusieurs refus de la part d'éditeurs estimant qu'une égyptologue ne pouvait pas écrire un roman sur la mythologie grecque, Amandine Marshall a soigneusement rangé ce manuscrit dans un tiroir tout en gardant l'espoir qu'il serait publié un jour. Et ce fut chose faite en 2017 !
Lorsque je me suis décidée à lire ce roman, j'avoue avoir eu un moment d'hésitation, craignant, vu le curriculum vitae de l'auteur, d'avoir entre les mains un roman savant et pompeux ne parvenant pas à se fondre dans les codes du roman historique. Mais, comme toujours, je ne juge que sur pièce et je me suis donc lancée dans la lecture.

Rendre justice à Hélène...
En consultant les différentes sources antiques relatives à l'histoire d'Hélène – elles sont citées en fin d'ouvrage –, l'auteur s'est aperçue que ce personnage mythologique avait été quelque peu maltraité par certains auteurs tardifs grecs et latins qui ont déformé son histoire au point de transformer Hélène en un personnage cynique, prétentieux et insensible, responsable du déclenchement de la guerre de Troie. Certes, tout le monde en convient, Hélène est la plus belle femme du monde, mais est-elle réellement un personnage machiavélique et sans coeur ou bien la victime impuissante d'une malédiction divine et le jouet des hommes ?
Puisant dans ces différents récits antiques, Amandine Marshall a choisi la forme romancée, plus précisément la forme du témoignage, pour raconter la vie d'Hélène, depuis sa naissance jusqu'à sa mort, et partant de là, pour redorer le blason de ce personnage. Car sa vie ne se résume pas à la guerre de Troie, loin de là !

Un récit captivant
Première plongée dans le temps, atterrissage en 500 avant Jésus-Christ, à Rhodes. Dans ce court chapitre introductif empreint d'une atmosphère lumineuse, pleine de chaleur et de senteurs, le lecteur fait la connaissance de Lysis, une jeune femme qui, déterminée à épouser Agésilas, l'homme qu'elle aime, décide d'invoquer l'aide de la déesse Dendritis – nom sous lequel Hélène était vénérée à Rhodes – en se rendant à son temple. Mais une fois arrivée devant l'enceinte sacrée après une longue marche, elle se rend subitement compte qu'elle a oublié d'apporter une offrande ! Tant pis, elle retournera au temple le lendemain et, sur le chemin du retour, elle ne peut s'empêcher de songer à Dendritis et à sa légende noire :
"[…] la jeune Rhodienne se demanda si Dendritis avait elle aussi connu les mêmes tourments de l'amour. Lysis connaissait sa vie par les chants des nombreux poètes qu'elle avait incontestablement inspirés, mais les versions différaient : les uns assénaient qu'elle n'avait été qu'une femme froide, manipulatrice et égoïste alors que les autres prenaient sa défense, invoquant une faible femme, à la merci des hommes et des dieux, qui n'ait eu pour elle que son incomparable beauté."
Touchée par le désarroi et l'attention de Lysis à son égard, Hélène apparaît durant le sommeil de cette dernière et, tout en lui garantissant qu'elle se mariera bien avec Agésilas, elle lui dévoile son histoire, la vraie :
"En général, les Hommes croient ce que disent les poètes et lorsque ceux-ci sont d'avis partagés, la légende naît et nul ne se soucie plus de la vérité. Les poètes ont raconté tant de choses sur moi… Pourtant, peu d'entre eux ont su esquisser quelle avait été véritablement ma vie, ou plutôt mon cauchemar. Vois-tu, Lysis, je n'ai jamais eu d'amie à qui me confier, j'ai toujours été désespérément seule et j'ai souffert toute ma longue vie de voir les gens – hommes et femmes – me juger et me condamner sans appel, sans même me laisser une chance."
C'est là qu'intervient la seconde plongée dans le temps... dans la nuit des temps, en compagnie d'Hélène. Mené à la première personne du singulier, le fameux "je" de la confidence, le récit prend alors une telle force que l'on se sent extrêmement proche d'Hélène, partageant sa vie, ses pensées et ses émotions. Tombée sous son charme, émue par ses souffrances et sidérée par les épreuves qu'elle a traversées, j'ai été totalement happée par le récit et par l'écriture envoûtante de l'auteur, tout en délicatesse et en fluidité, plongeant ainsi dans un fabuleux voyage dans le temps, dont j'aurais aimé ne jamais sortir...

Une saga familiale antique !
Ce roman est une véritable saga familiale antique, une épopée, avec des personnages si bien incarnés, avec leurs qualités et leurs défauts, leurs émotions, que je n'ai pas pu m'empêcher de croire à certains moments qu'ils avaient réellement existé ! Tyndare, Léda, Thésée, Ménélas, Agamemnon, Clytemnestre, Priam, Hécube, Pâris, Oenone, Hector, Cassandre, Andromaque, Achille, Ajax, Déiphobe, Ulysse, Pénélope, Oreste... tous ces personnages et tant d'autres encore figurent dans ce roman qui parvient à nous présenter de manière claire la mythologie grecque non pas comme un ensemble d'histoires abstraites et décousues mais comme autant d'épisodes et de personnages reliés les uns aux autres.
Toutes proportions gardées, car on n'est ni sur le même public, ni dans le même genre littéraire, l'angle d'approche – des dieux et des déesses qui semblent faits de chair et de sang – m'a fait penser à la série de romans fantasy "Percy Jackson" de Rick Riordan, destinés aux adolescents. Passionnée de généalogie, je me suis régalée de toutes ces histoires de famille et j'ai apprécié la présence en fin de roman des deux arbres généalogiques et des cartes ! Au fil de ma lecture, tous ces épisodes qui me semblaient jusqu'alors vides de sens se sont connectés au fur et à mesure les uns aux autres comme dans un circuit électrique et une fois la dernière page tournée je me suis aperçue que j'avais assimilé énormément de connaissances sans même m'en apercevoir !
L'aspect physique du livre y est certainement aussi pour quelque chose : son format est agréable, la mise en page est soignée, le noir texte est bien équilibré. Mon seul petit bémol porte sur le graphisme de la couverture dont je ne raffole pas même s'il a le mérite d'être clair et identifiable de loin : compte tenu de la richesse de ce roman et de son contenu très incarné, le graphisme me semble trop strict et plus adapté à un manuel de mythologie grecque qu'à un roman.

Pour finir, je dois vous l'avouer, mais j'ai usé de tous les stratagèmes imaginables pour ne pas lire trop vite et pour rester le plus longtemps possible dans cet univers dans lequel je me sentais bien. La chute du roman a été une véritable surprise pour moi, voire un choc, car j'ignorais comment Hélène avait péri… j'étais même révoltée ! Et je ne voulais pas la quitter...
Alors, à la question posée en début d'article – Hélène est-elle un être froid et machiavélique ou bien une femme victime des hommes et des dieux ? –, je pense que vous vous doutez de ma réponse ! En donnant la parole à Hélène et en puisant dans les différentes sources antiques, Amandine Marshall nous offre un magnifique portrait de femme, débarrassé de tous les travers dont on l'a affublée, une femme courageuse sur laquelle le sort s'acharne mais qui jamais ne baisse les bras, une femme qui pourrait ressembler à bien des femmes aujourd'hui...

Merci aux éditions Tautem de m'avoir permis de découvrir ce beau roman !

♜ ♜ ♜ ♜ ♜ ♜

En conclusion
Points forts :
  • Un point de vue original donnant naissance à un portrait inédit d'Hélène de Troie, enfin débarrassée de tous les clichés qui lui collent à la peau.
  • Une véritable saga familiale antique avec des personnages réalistes dotés d'émotions humaines !
  • Un récit extrêmement bien documenté et structuré, abordant la mythologie comme une grande épopée romanesque : on apprend énormément de choses sans s'en apercevoir.
  • Une écriture tout en douceur et en fluidité.

Points faibles :
  • Le graphisme strict et un peu trop basique de la couverture, en contradiction avec la richesse et l'originalité du roman.

Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : Tautem
Date de parution : mars 2017
Couverture : brochée
Format : 15 cm x 21 cm
Pagination : 368 pages
ISBN : 979-1-0972-3001-2

mercredi 30 mars 2016

L'affaire Arnolfini. Les secrets du tableau de Van Eyck

L'affaire Arnolfini
Auteur : Jean-Philippe Postel
Préface : Daniel Pennac

Texte de présentation

Peint aux alentours de 1434, Les Époux Arnolfini de Jan Van Eyck aura été l'un des tableaux les plus commentés de l'histoire de la peinture Pourtant, Jean-Philippe Postel nous fait découvrir ici ce que personne avant lui n'y a vu. C'est d'abord la stupeur qui guide notre lecture : stupeur de trouver révélées et élucidées, les unes après les autres, toutes les énigmes distillées par Van Eyck dans une oeuvre infiniment mystérieuse. Du début à la fin, une curiosité folle nous fait tourner ces pages aussi avidement que celles d'un roman policier. Telle est la prouesse de Jean-Philippe Postel : nous donner à comprendre ce que nous voyons dans la ferveur de lire ce que nous lisons.

Mon avis : Coup de coeur !


Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : Actes Sud
Date de parution : mars 2016
Couverture : brochée
Format : 11,5 cm x 21,7 cm
Pagination : 160 pages
ISBN : 978-2-3300-6091-6

Livre numérique

Éditeur : Actes Sud
Format : 7switch : ePub –– Amazon : Kindle –– Decitre : ePub ou PDF –– ePagine : ePub –– Fnac : ePub –– Numilog : ePub ou PDF

jeudi 5 novembre 2015

Le ciel de la chapelle Sixtine

Le ciel de la chapelle Sixtine
Auteur : Leon Morell
Traduction : Lydia Beutin

Texte de présentation

Marqué depuis sa plus tendre enfance par une rencontre avec Michel-Ange, Aurelio, un jeune paysan d'une rare beauté, se rend à Rome pour se mettre au service du plus grand artiste de son temps.
À 33 ans, Michel-Ange s'estime davantage sculpteur que peintre ; pourtant, Jules II, le "Papa terribile" de la Renaissance, s'obstine à lui confier la décoration de la voûte de la chapelle Sixtine. Juché sur un échafaudage à 18 mètres du sol, sa barbe tournée vers le ciel et la peinture dégoulinant sur son visage, Michel-Ange réussit le tour de force de réaliser ces fresques qui feront sa gloire. Une prouesse qu'il doit essentiellement à l'indéfectible soutien d'Aurelio, sa muse, mais également à la réalisation en parallèle d'une mystérieuse commande qui pourrait bien lui coûter la vie : une sculpture de l'un des personnages les plus sulfureux de la cité éternelle.
Sans jamais s'éloigner de la vérité historique, Léon Morell retrace la période romaine de Michel-Ange, quatre années durant lesquelles, entre jalousies et luttes de pouvoir, il aura su créer l'un des plus grands chefs-d'oeuvre de la peinture de la Renaissance italienne. Un roman haletant, à mi-chemin entre la biographie et le thriller, décrivant sans compromis l'ambiguïté d’une Rome entre grandeur et décadence.

En complément

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Mon avis : Coup de coeur !

En résumé
Au printemps 1508, un jeune homme d'une grande beauté, dénommé Aurelio, décide de quitter sa famille installée à la campagne pour gagner Rome. Son rêve : travailler pour le grand Michel-Ange et devenir sculpteur. Artiste renommé, Michel-Ange vient justement d'être choisi par le pape Jules II pour décorer la voûte de la chapelle Sixtine à Rome. La rencontre d'Aurelio et sa présence aux côtés de Michel-Ange seront déterminantes dans la réussite de cette oeuvre magistrale...

Un roman à la gloire de Michel-Ange
Les sources historiques utilisées pour écrire ce roman ne sont pas indiquées, mais différents détails permettent de supposer que l'auteur s'est fortement appuyé sur les biographies élogieuses de Giorgio Vasari et d'Ascanio Condivi, écrites du vivant de l'artiste et à l'origine du mythe Michel-Ange. Un mythe soigneusement entretenu au cours des siècles suivants, notamment par ses descendants, dont l'un d'eux n'hésita pas à modifier les sonnets écrits par Michel-Ange pour faire taire les rumeurs homosexuelles à son sujet.
"Fuyez l'amour, amants, fuyez ses flammes vives ;
sauvage est son brasier, mortelle sa brûlure :
dès son premier assaut, il n'est plus rien qui vaille,
ni force, ni raison ni changement de lieu.

Fuyez, n'avez-vous pas la victime exemplaire
d'un bras cruel et d'une flèche pénétrante :
lisez en moi quel pourrait être votre mal,
combien le jeu sera féroce et sans pitié.

Fuyez, ne tardez pas, dès le premier regard :
je pensais m'entendre en tout temps avec l'amour,
mais je sens, mais vous pouvez voir, comme je brûle."

Michel-Ange Buonarrotti, Poèmes, Sonnet inachevé

Ainsi basé sur le mythe Michel-Ange, ce roman met donc en exergue un artiste génial mais torturé, incompris, solitaire, jalousé et harcelé par sa famille. Or, depuis le XIXe siècle, les recherches permettent de brosser un portrait plus nuancé de l'homme. Voici quelques exemples :
  • D'après le roman, ce serait Bramante qui aurait suggéré au pape Jules II de confier en 1508 la décoration de la voûte de la chapelle Sixtine à Michel-Ange, à seule fin de le voir échouer et de précipiter sa disgrâce auprès du souverain pontife. Mais une autre version indique que c'est le pape Jules II qui est à l'origine de ce choix et que Bramante aurait émis, à juste titre, des réserves quant à l'opportunité de confier une tâche aussi complexe à un artiste qui n'avait aucune expérience de la peinture à fresque. Même si Jules II n'était pas d'un caractère commode et que Michel-Ange se considérait avant tout comme un sculpteur, n'ayant que très peu d'expérience en peinture à fresque, ce dernier accepta la commande avant tout pour des raisons lucratives, la somme proposée était exceptionnelle pour l'époque, et il recruta des artistes chevronnés pour l'aider dans cette tâche… il ne créa donc pas tout seul cette oeuvre !
  • Le roman suggère également que Michel-Ange, en modifiant la commande de la voûte, a pris d'énormes risques, alors qu'il a en fait établi ce programme en concertation avec les théologiens de la cour papale, soucieux de mixer la tradition païenne et la culture catholique.
  • Enfin, contrairement à la légende, l'oeuvre en cours d'élaboration était visible de tous, accueillant artistes, collectionneurs, amateurs d'art, mais aussi personnalités en vue de la cité... nous sommes bien loin de la vision de l'artiste esseulé sur son échafaudage !
Cependant, pour que l'histoire reste cohérente, l'auteur devait prendre un parti et la restitution romanesque de ce moment-clé de la vie de Michel-Ange se révèle passionnante, d'autant que l'auteur mêle parfaitement bien une certaine réalité à la fois historique et artistique et la fiction, à travers le personnage d'Aurelio. En outre, le récit, au style très fluide, alternant scènes descriptives et dialogues, se lit avec bonheur et facilité, et nous permet d'apprendre énormément de choses sans même s'en rendre compte.
Reste que l'absence d'indications concernant les sources utilisées est pour moi problématique. Une fois ma lecture achevée (que j'aurais aimé ne jamais terminer !), je me suis précipitée sur des biographies de Michel-Ange pour en savoir davantage sur sa vie et pour confronter les informations de l'auteur et celles d'historiens. Tout cela pour obtenir une vision plus nuancée et plus vraie de Michel-Ange.

Une commande étonnante
Ce roman nous présente l'oeuvre de Michel-Ange d'une manière très accessible et très claire, nous permettant de bien la situer dans l'histoire artistique, de comprendre les enjeux qui se cachent derrière elle et en quoi elle est révolutionnaire.
La chapelle Sixtine, réplique du temple de Salomon et dont la forme s'inspire de l'architecture militaire, a été construite sous le pontificat de Sixte IV, l'oncle de Jules II. Décorée par les meilleurs artistes florentins de l'époque – Le Pérugin, Botticelli, Ghirlandaio, etc. –, la chapelle est, trente ans plus tard, défigurée par des fissures. Il est grand temps de restaurer sa voûte.
En mai 1508, Michel-Ange s'engage à réaliser des fresques représentant les douze apôtres dans les pendentifs et des motifs ornementaux dans les parties restantes. Excepté dans l'atelier de Ghirlandaio, vingt ans plus tôt et seulement de manière marginale, Michel-Ange n'a encore aucune expérience de la peinture à fresque ! Il aurait pu se contenter d'un ciel étoilé, mais il n'hésite pas à se lancer dans la réalisation d'une fresque immense peuplée d'une multitude de figures.

Ainsi, quatre ans plus tard, en 1512, les Romains découvrent une oeuvre révolutionnaire ! Renonçant à la perspective unique, Michel-Ange réalise une oeuvre dans laquelle chaque surface a sa propre perspective centrale : c'est une perspective polycentrique qui ne permet pas au spectateur de saisir depuis un seul point toute la fresque. En divisant la voûte avec des corniches de marbre, il a créé un espace artificiel dans lequel prennent place des scènes de la Genèse, ainsi que les Prophètes et les Sibylles dans les écoinçons et les ancêtres du Christ dans les lunettes. Sans oublier les ignudi, des hommes nus rappelant les génies, assis sur les ressauts des corniches. Un récit donc entièrement centré sur la figure humaine, avec de nombreux nus masculins.

L'absence de planches de visuels des oeuvres de Michel-Ange
Le visuel de couverture, qui s'imposait avec évidence, est magnifique, mais il aurait été intéressant de reproduire dans l'ouvrage des planches en couleurs de la chapelle Sixtine et de ses voûtes, même si cette pratique est plus courante dans les biographies. Car ce roman si visuel dans ses descriptions est d'une telle précision que le lecteur ressent le besoin d'aller vérifier les détails fournis par l'auteur mais est un peu déçu en s'apercevant qu'il n'y a pas une seule reproduction du chef-d'oeuvre de Michel-Ange dans le roman.

La description précise du déroulement du chantier
L'élaboration de cette oeuvre inédite est retranscrite de manière minutieuse, sur la base d'une documentation fouillée. De prime abord, la technique de la peinture à fresque n'a rien de très glamour, mais elle se révèle passionnante sous la plume de l'auteur : il parvient à nous y intéresser non pas en nous bombardant d'informations théoriques mais en nous décrivant les faits et gestes des différents artistes de la bottega de Michel-Ange au jour le jour. On découvre ainsi à travers ces personnages les différentes étapes de la peinture à fresque, le quotidien du métier de fresquiste, le déroulement d'un chantier, le fonctionnement d'une bottega et toutes les émotions qui accompagnent une telle aventure : joie, déconvenues, souffrance, etc. Il s'agit véritablement d'un travail d'équipe, qui nécessite une parfaite coordination.
En effet, la décoration de la voûte de la chapelle Sixtine est une entreprise pleine de difficultés : la surface à peindre est immense et très en hauteur, sa forme courbe crée des déformations et impose de peindre la tête tournée vers le haut, l'échafaudage doit permettre aux célébrations d'avoir lieu même pendant les travaux, etc.
Le problème de l'échafaudage est rapidement résolu par Piero Rosselli avec l'installation de sorgozzoni, des tenons en bois fixés dans les murs et qui supportent les passerelles de l'échafaudage. Cette technique, alors courante à Florence, permet de laisser le sol dégagé pour la célébration des cérémonies prévues pendant la rénovation et d'éviter de laisser des trous d'accrochage dans la voûte.
Une fois l'échafaudage mis en place, Michel-Ange inspecte le plafond et doit se résoudre à ôter la fresque existante et poser un nouvel arriccio (couche de plâtre appliquée sur la maçonnerie). En effet, initialement, l'artiste pensait préparer le plafond en martellinatura : la fresque préexistante est percée d'une multitude de trous à l'aide d'un picot, de telle sorte qu'on peut appliquer l'intonaco pour la nouvelle fresque directement sur l'ancien arriccio. Mais, dans le cas présent, la fresque s'est presque détachée de la maçonnerie. Cette tâche, confiée à Aurelio, se révèle assez fastidieuse au point que le jeune homme se démet la clavicule au bout de quelques jours de labeur (merci aux compresses à la ricotta !). En outre, aux heures les plus chaudes de la journée, l'échafaudage devient une fournaise et se transforme vite aussi en bain de vapeur tant il faut d'eau pour mélanger l'arriccio.
Pendant que l'arriccio sèche, Michel-Ange prépare ses dessins à l'échelle réelle sur un carton tandis que son équipe se charge de préparer l'intonaco, l'enduit qui va recouvrir l'arriccio. L'application de l'intonaco demande aussi de la précision : on le pose en strates plus minces que l'arriccio pour éviter que des fissures se forment lors du séchage, et il faut qu'il soit plus régulier que l'arriccio sinon l'intonaco ne prend pas les couleurs de façon uniforme.
Une fois l'intonaco appliqué, il faut appliquer les pigments dissous dans l'eau avant que l'enduit ne durcisse, c'est-à-dire dans un délai de 24 à 48 heures après son étalement. Le carton est alors fixé sur le support par des aiguilles et on reporte les lignes du dessin sur l'enduit. Pour cela, il existe deux techniques de transfert :
  • La plus simple et la plus rapide consiste à dessiner les lignes avec un crayon fin, de telle sorte que des rainures fines restent visibles dans l'enduit encore humide.
  • La méthode la plus exacte, mais aussi la plus compliquée, consiste à perforer le carton le long des lignes de centaines de petits trous d'aiguille, puis de le "poudrer" avec des petits sacs remplis de poussière de charbon, afin que les lignes soient reportées sur l'intonaco.
Comme Michel-Ange n'a pas l'habitude de peindre des fresques, il préfère éviter tout risque dans un premier temps. Par la suite, il réalisera de nombreuses parties sans le secours du carton !
Quand la giornata (surface prévue pour la journée) est enduite, on efface ensuite avec des draps humides les traces de l'enduit et on frotte l'intonaco pour le rendre un peu rugueux.
Tout ce travail est réalisé dans des conditions assez compliquées : échafaudage en hauteur, alternance de la chaleur en plein été et du froid en hiver, peu de lumière naturelle, position inconfortable des corps, à la fois tordus et penchés en arrière... Et un travail qui ne tolère pas l'approximation...

Une tâche méticuleuse et exigeante
Bien qu'entouré de fresquistes renommés, Michel-Ange découvre un jour des moisissures sur la quasi-totalité de la fresque en cours de réalisation. Comme l'arriccio est sec, le responsable est l'intonaco qui est trop humide. Fureur de l'artiste qui voit son travail détruit par un manque d'expérience des matériaux romains. En effet, Piero Rosselli, le maître maçon florentin, a l'habitude d'utiliser de la chaux de marbre et du sable de l'Arno, et non de la chaux de travertin et de la pouzzolane. Or, ces matériaux réagissent différemment. Giuliano da Sangallo finit par trouver le bon mélange entre les différents matériaux. L'enduit est entièrement détruit et repeint par Michel-Ange : voilà deux mois de travail détruit...
Du fait de son inexpérience et des conséquences dramatiques qu'il a dû affronter au début de son travail, on ne peut qu'être stupéfait de la maîtrise technique et formelle que manifeste Michel-Ange, car il ne fera pas d'autres erreurs par la suite. Erreurs qui auraient pu être les suivantes :
  • Du fait des variations d'humidité et de température et d'un travail qui s'étale sur plusieurs années, il est difficile d'obtenir chaque jour la même qualité de mélange et la même qualité d'enduit sur le mur. Le risque est que la différence des "journées" se traduise par des inégalités dans l'étalement et la prise du mortier.
  • Les coloris : la couleur se prépare en mélangeant à l'eau un pigment très fin. Mais il suffit de petits changements dans la finesse et la quantité de pigment ou dans son rapport avec l'eau pour que la couleur finale soit différente. Or les coloris doivent être homogènes, au moins dans les parties adjacentes. Mais l'effet final ne peut être contrôlé que lorsque l'enduit est entièrement sec alors qu'il n'est pas possible d'intervenir sur la peinture une fois l'enduit sec.
Ainsi, à travers ce roman, on découvre toute l'histoire de la fresque de la voûte de la chapelle Sixtine, depuis la conception de son programme iconographique jusqu'à son inauguration spectaculaire, en passant par sa réalisation technique et les difficultés qui se sont présentées au cours du chantier.

Michel-Ange, un être torturé mais un génie !
Même si, comme je l'ai expliqué au début de ma critique, le portrait dressé de Michel-Ange est très flatteur et trop conforme au mythe de l'artiste maudit et seul face à l'adversité du monde, il n'en ressort pas moins que Michel-Ange était une personnalité complexe, un être tourmenté, méfiant, colérique, perfectionniste, exigeant avec lui-même comme avec les autres, à la recherche perpétuelle de la perfection, qui ne souffrait pas la médiocrité.
Ainsi, un jour, alors qu'Aurelio pénètre dans la chambre de Michel-Ange, une pièce dans laquelle personne n'a le droit d'entrer, il découvre des centaines de dessins recouvrant le sol : ce ne sont pas des esquisses destinées à la voûte de la chapelle Sixtine mais des monstres, des démons… ces démons qui le poursuivent nuit et jour, mais on ne saura rien. En effet, ce roman se concentre sur la portion de vie durant laquelle Michel-Ange a réalisé la décoration de la voûte de la chapelle Sixtine, mais il n'aborde pas du tout le reste de sa vie, rien sur sa jeunesse, son adolescence ou bien sa vieillesse. D'où viennent ces démons ? Qui sont-ils ? Pourquoi se considère-t-il comme un pécheur et ne trouve-t-il l'apaisement et le pardon que dans la création ? Ce roman n'apporte certes pas de réponses, mais il permet de mieux cerner la riche personnalité de Michel-Ange.
"– Je parle en tant qu'homme, expliqua Michel-Ange, et non en tant qu'artiste. Je croyais être un homme meilleur. Alors que je ne suis qu'un pauvre pécheur tourmenté par de mauvaises pensées, gonflé de vanité. Une créature pitoyable – il se redressa comme pour se débarrasser d'un fardeau ; au fond de ses yeux brillait à nouveau une étincelle combative. En tant qu'artiste, je n'ai de comptes à rendre qu'à Dieu !"
"– Regarde-moi, répondit Michel-Ange en écartant les bras comme un coupable. Que veux-tu que je fasse d'une chemise neuve ? Je suis laid, Aurelio. Même avant que Torrigiani m'écrase le nez, je n'étais pas beau, mais depuis c'est encore pire. Il baissa les yeux. Ma laideur n'est pas digne d'une belle chemise."
Avec une telle personnalité, Michel-Ange n'est pas une personne facile à vivre au quotidien, surtout pour les artistes de sa bottega qui finissent tous par quitter le chantier. Ne reste qu'Aurelio et un jeune aide. Car, au fur et à mesure que Michel-Ange se familiarise avec la technique de la peinture à fresque et prend donc confiance en lui, il délègue de moins en moins de tâches à ses collègues qui se sentent alors frustrés, d'où leur départ. Il faut dire que tous sont des fresquistes renommés et ils supportent mal le fait que Michel-Ange s'attribue tout le travail. Par exemple, il n'a laissé à Tedesco que la peinture d'une flaque d'eau, d'un peu de ciel et de deux branches d'arbre de la scène du Déluge !

Des histoires de famille...
Ses biographes ont mis en lumière les relations compliquées que Michel-Ange entretenait avec sa famille, source perpétuelle de contrariétés. Dans ce roman, son père et ses frères lui demandent sans cesse de l'argent alors que pendant des années ils estimaient qu'il faisait un travail déshonorant et qu'il souillait le nom de la famille.
La réalité est cependant quelque peu différente. En effet, Michel-Ange était tellement avare qu'il se privait même du strict minimum (nourriture, logement, vêtements), refusant le moindre confort. La description donnée de sa bottega est un bon exemple : c'est une maison misérable avec un étage dont le crépi s'effrite. Au rez-de-chaussée, il y a une pièce sans fenêtre, avec une table faite de planches posées sur des tréteaux entourées de quatre chaises branlantes, et son atelier au sol recouvert de poussière blanche. Sa chambre, à l'étage, ne comporte que le strict minimum.
Certes, sa famille vivait grâce à l'argent de Michel-Ange, mais il ne semble pas qu'elle ait été une si grande source d'ennuis comme le suggère le roman, même s'il est certain que des tensions ont existé, notamment avec son frère Giovan Simone.

Bramante et Raphaël, ses rivaux
C'est en confrontant Michel-Ange à ses deux principaux rivaux d'alors – Bramante et Raphaël – que l'auteur parvient à cerner encore davantage, par contraste, la personnalité de Michel-Ange. En effet, aucun des deux ne trouve grâce aux yeux de Michel-Ange, même si c'est pour des raisons différentes. Pire encore, ils les considèrent comme des "envieux, des concurrents, des intrigants". Dans le roman, Michel-Ange surnomme même Bramante "le lèche-bottes aux yeux globuleux" !
Quant à Raphaël, la comparaison avec Michel-Ange est vraiment intéressante, car ces deux artistes sont vraiment aux antipodes l'un de l'autre : autant Raphaël est sociable et lumineux, autant Michel-Ange est sauvage et ombrageux. Raphaël fait montre d'une grâce courtisane et d'une peinture gracieuse et parfaite tandis que Michel-Ange est peu avenant et son art tourmenté. Voici comment Michel-Ange décrit Raphaël :
"Il y avait d'autres raisons à l'aversion prononcée que le maître d'Aurelio nourrissait contre l'artiste plus jeune que lui de huit ans : son attitude souple, sa politesse flatteuse, sa popularité, ses manières affables, sa beauté fragile aussi bien que son « regard de chien fidèle qui fait fondre le coeur de toutes les femmes », selon Michel-Ange. Mais le talent artistique de Raphaël était indéniable. Certes, Michel-Ange trouvait que les madones de Raphaël étaient bien trop « sucrées », mais sa composition témoignait de la plus grande maîtrise.
Tout comme Michel-Ange, Raphaël avait vite dépassé son maître et, à vingt-cinq ans, il était parvenu au sommet de son art. Derrière les murs du Vatican régnait une guerre entre les artistes, dans laquelle aucun des combattants ne connaissait les armes de son concurrent."
"Comme toujours, entouré d'un cercle d'admirateurs et de jeunes femmes aux coiffures extravagantes qui espéraient qu'un peu de sa gloire les éclabousserait. Comme ce visage dégoûtait Michel-Ange, les traits fins, le nez long et droit, les cheveux sombres, lisses et brillants, qui reposaient sur ses épaules. Un tableau de maître. Comment pouvait-on être si obnubilé par l'idée d'être aimé et adulé de tous ?"
Certes, à l'époque, la concurrence entre artistes est rude, ils n'hésitent pas à s'observer les uns les autres, à se dénigrer mutuellement, à craindre pour leur popularité, mais l'on sent tout de même chez Michel-Ange une certaine tendance à la paranoïa, puisqu'aussi bien Bramante que Raphaël ont reconnu le talent de Michel-Ange après qu'il eut réalisé la décoration de la voûte Sixtine. Michel-Ange semble toujours être sur ses gardes, il s'attend toujours à un piège ou à un coup bas, mais le pape Jules II n'est peut-être pas tout à fait étranger à cette prudence exacerbé...

Un portrait sans concession du pape Jules II
"Toute son attitude démontrait qu'on avait à se soumettre à lui. Le pontife n'avait de comptes à rendre à personne, en dehors du Seigneur Dieu tout-puissant. Et encore, ce n'était pas si sûr. Son visage était anguleux et sa bouche aux lèvres fines était surplombée par un nez fort. Mais, le plus remarquable, c'était son regard clair et perçant, sous des sourcils broussailleux."
Présenté comme un homme irascible, autoritaire, énergique et mal disposé envers Michel-Ange, Jules II est également connu pour avoir été un pape combatif, un pape-soldat, qui a voulu faire de l'État pontifical une grande puissance. Pour cela, il n'hésite pas à utiliser les armes spirituelles contre ses ennemis et à participer personnellement aux campagnes militaires, ce que ce roman met bien en valeur. Préoccupé de l'équilibre des puissances en Italie, cet ambitieux chef d'État, plus séculier que religieux, rétablit son autorité sur les États de l'Église, élimine tour à tour César Borgia, les Vénitiens puis les Français de la Romagne et du Milanais, accroissant simultanément le territoire des États pontificaux.
S'il est certain que le pape n'a pas pour habitude qu'on lui résiste, il n'en demeure pas moins qu'il a énormément de considération et d'admiration pour Michel-Ange, sinon il ne lui aurait jamais confié la réalisation de son mausolée et la décoration de la voûte de la chapelle Sixtine. Mais Michel-Ange, avec son caractère intransigeant et avaricieux, n'est pas une personnalité facile à gérer et il y a parfois de quoi perdre sa patience, surtout lorsqu'on s'appelle Jules II ! Quand deux personnalités fortes se rencontrent, cela crée des étincelles !

La Rome du début du XVIe siècle comme si on y était !
Par le biais d'un narrateur omniscient qui suit en permanence Aurelio, l'auteur dépeint une ville pleine de contrastes. Loin de rester cloîtré dans la chapelle Sixtine, Aurelio déambule dans la ville et fréquente aussi bien les sous-sols du palais papal que des quartiers moins bien fréquentés, puisqu'il fréquente une courtisane, Margherita, qui espère devenir une courtisane honorable, entretenue par un ou plusieurs admirateurs, mais qui finit "courtisane à la bougie" suite à une mésaventure, donc dépendante d'un proxénète. Eh oui, la Rome catholique du XVIe siècle, qui conjugue luxe, beauté et richesse, possède un second visage, bien moins glorieux.
"Rome correspondait bien à ce qu'Aurelio s'était imaginé. La Ville éternelle était aussi gigantesque que majestueuse. Elle brillait comme une promesse. Ses murs résonnaient de l'écho du pas noble des chevaux caracolant dans les rues. Aurelio s'émerveillait des manches de velours bordées d'hermine, des carrosses fermés aux ferrures dorées, des maisons à l'allure de forteresses, des portes et des églises imposantes. Rome était tout cela, mais aussi son contraire. Tout ce qui était beau dans cette ville se voyait associer la laideur, comme une preuve de son évidente ambiguïté. Comme pour rendre la beauté encore plus belle et la laideur encore plus laide. Le patricien était suivi d'une demi-douzaine de mendiants en haillons. La façade de marbre côtoyait des ruines. Les ruelles étaient envahies de débris et d'excréments de toutes sortes. Tout ce qui ne servait plus était jeté par les fenêtres ou balayé dehors. Dans cette ville, c'était chacun pour soi."
À la richesse du quartier de la place Saint-Pierre s'oppose des quartiers miséreux, mal famés, sales, tel le Vélabre : "Le Vélabre avait été un marécage jusqu'à ce que Tarquin l'Ancien eût l'idée de faire creuser la cloaca maxima. Pendant des siècles, le Vélabre a ensuite été un quartier animé, apprécié des marchands ambulants, des devins et des danseurs. Mais le V est devenu un cloaque depuis car le système d'égout est sans cesse interrompu et les canaux sont bouchés au point qu'on a été obligés d'installer des planches pour cheminer au-dessus des eux usées stagnantes sans compter les mauvaises odeurs."

♜ ♜ ♜ ♜ ♜ ♜

En conclusion
Points forts :
  • Un roman très documenté et qui mêle brillamment réalité artistique et fiction.
  • Un contexte historique bien campé en arrière-plan, qui ne vient jamais troubler le récit mais le complète utilement.
  • Une approche romanesque, à la fois pleine de vie et accessible à tous, pour découvrir et comprendre ce chef-d'oeuvre de la Renaissance.
  • Des personnages historiques très bien incarnés, dotés d'une forte présence aussi bien physique que psychologique : Michel-Ange, Bramante, Raphaël, Jules II.
  • Une présentation très instructive et passionnante du milieu artistique de la Renaissance à Rome : méthodes de travail, vie quotidienne, cadre de vie, rivalités, etc.

Points faibles :
  • Pas de mention des sources historiques utilisées ni de bibliographie.
  • Une vision partiale et subjective de cet épisode de la vie de Michel-Ange et du personnage lui-même.
  • Absence de reproductions de la voûte de la chapelle Sixtine.

Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : Pocket
Date de parution : novembre 2015
Couverture : brochée
Format : 10,8 cm x 17,7 cm
Pagination : 624 pages
ISBN : 978-2-2662-5391-8

Livre numérique

Éditeur : Hervé Chopin
Format : 7switch : ePub –– Amazon : Kindle –– Decitre : ePub –– ePagine : ePub –– Fnac : ePub –– Numilog : ePub

mercredi 6 juin 2012

Sator. L'énigme du carré magique

Sator
Auteur : Alain Le Ninèze

Texte de présentation

Rome et Jérusalem, 62-67 après Jésus-Christ. Trente ans après Ponce Pilate, Lucius Albinus est procurateur de la province de Judée. À la demande de son oncle, Balbus Pison, sénateur romain secrètement converti au christianisme, Albinus entreprend de déchiffrer le cryptogramme sacré qui sert de signe de ralliement aux premiers chrétiens persécutés par Néron. L'enquête qu'il mène en Palestine le conduit à rencontrer les derniers témoins encore vivants du procès et de la mort de Jésus. Pendant ce temps, la récolte gronde en Judée contre l'occupant romain. Le procurateur est entraîné malgré lui dans la tourmente de la première insurrection juive qui aboutira en 67 à la libération éphémère de Jérusalem...
Connu depuis l'antiquité par des inscriptions découvertes en divers lieux du monde chrétien, le mystérieux cryptogramme, appelé "carré Sator", a été exhumé des ruines de Pompéi en 1936 et daté de 62 après Jésus-Christ, mais il n'a jamais pu être déchiffré. Le récit de Lucius Albinus jette une lumière nouvelle sur cette fascinante énigme de l'archéologie chrétienne.

Prix Jean d'Heurs du Roman Historique 2008.

Mon avis : Coup de coeur !

Attention, si vous commencez à lire ce roman, vous ne pourrez plus le lâcher ! Partant d'une énigme archéologique réelle (le "carré Sator"), l'auteur nous entraîne sur les traces des premiers chrétiens à Rome et en Palestine. En mêlant alternativement deux récits, celui de Lucius Albinus et celui de Balbus Pison, il nous invite à suivre ces deux personnages qui mènent une enquête captivante. Un roman érudit, bien écrit et accessible à tous. Et on y apprend plein de choses sur cette période encore mal connue.
En fin d'ouvrage sont reproduits des documents photographiques montrant diverses versions du cryptogramme, depuis celles du Ier siècle après Jésus-Christ à Pompéi.

Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : Babel
Date de parution : juin 2012
Couverture : brochée
Format : 11 cm x 17,6 cm
Pagination : 256 pages
ISBN : 978-2-3300-0975-5

Livre numérique

Éditeur : Actes Sud
Format : 7switch : ePub ou PDF –– Amazon : Kindle –– Decitre : ePub ou PDF –– ePagine : ePub –– Fnac : ePub –– Numilog : ePub ou PDF

dimanche 11 septembre 2011

Au temps où la Joconde parlait

Au temps où la Joconde parlait
Auteur : Jean Diwo

Texte de présentation

Un jeune peintre sicilien, Antonello, part à dos de mulet pour aller chercher jusqu'à Bruges un secret bien gardé, celui de la peinture à l'huile, découvert par Van Eyck. Un pari fou qu'il gagnera. Antonello de Messine rapportera en Italie la formule du nouveau solvant, après trois années de péripéties dramatiques, drôles et amoureuses.
De Florence à Rome, de Naples en Flandre, de Milan à la cour de François Ier, nous suivons le prodigieux théâtre ambulant des génies de la Renaissance. Ces acteurs qui se donnent la réplique avec passion, qui vivent leur art et leur foi jusqu'à en mourir, aiment et haïssent, se nomment Léonard de Vinci, Michel-Ange, Botticelli, Savonarole, les Médicis, Raphaël, Machiavel, Lucrèce et César Borgia...
Encore faut-il ajouter à cette distribution fabuleuse les papes, les princes, les condottieri qui accompagnent du fracas de leurs armes la plus magnifique éclosion de chefs-d'oeuvre de l'histoire. C'est le temps où Léonard, entre deux inventions de machines volantes, écoute parler Mona Lisa dont il peint le visage mystérieux. Ce panneau de peuplier qu'il apportera dix ans plus tard à Amboise dans ses bagages deviendra la mythique "Joconde".

Mon avis : Coup de coeur !

Un roman qui replace les oeuvres d'art dans le contexte historique et artistique de l'époque
Un conseil : si vous avez suivi des cours d'histoire de l'art ou si vous êtes passionnés par le Quattrocento et le Cinquecento, plongez dans ce fabuleux roman historique qui vous permettra de remettre les oeuvres d'art que vous connaissez dans leur contexte et de mieux appréhender le foisonnement artistique de ces périodes.
Pour ma part, grâce à ce roman, ces oeuvres ont enfin pris vie, loin de l'enseignement académique que j'ai suivi ("nom de l'oeuvre, nom de l'artiste, nature de l'oeuvre, dimensions, technique utilisée, lieu de conservation..."), ainsi que les artistes. En effet, on oublie bien souvent, toujours à cause de l'enseignement cloisonné et très intellectualisé dispensé à l'université, qu'ils étaient tous en relation les uns avec les autres. Pour ceux qui découvriraient la Renaissance italienne d'un point de vue artistique, vous ne serez pas déçus, mais, pour en profiter pleinement, n'hésitez pas à rechercher les oeuvres sur Internet, ça change tout !

Des personnages extraordinairement vivants
Alliant avec brio un bon rythme narratif et une richesse de détails et d'informations, ce roman débute avec Antonello de Messine, jeune apprenti au service d'un maître italien spécialiste des fresques à la détrempe. Mais Antonello est subjugué par les toiles du maître flamand Van Eyck qui a mis au point dans le plus grand secret un nouveau vernis qui donne à ses toiles un éclat, une lumière jusqu'ici inconnus. Il va alors partir à dos de mule pour Bruges afin d'y rencontrer Van Eyck, entrer à son service et rapporter en Italie le secret de fabrication de la peinture à l'huile du maître. Cette nouvelle technique va faire sa gloire et précipiter l'Italie vers la Renaissance avec des artistes comme Giovanni Bellini, Filippo Lippi, Léonard de Vinci, Michelangelo Buonarroti, Andrea del Verrocchio, Botticelli, Raphaël. Les dialogues passionnés de Léonard de Vinci face à son grand rival florentin Michel-Ange, de Botticelli ou bien de Raphaël résonnent de manière extraordinairement vivante, comme si tous ces génies se matérialisaient subitement pour nous faire découvrir quelques pans concrets de l'histoire à travers leurs paroles et leurs actes.

Un contexte historique bien intégré à la trame du roman
Comme ces artistes entretenaient des relations très étroites avec les rois, papes et autres grands de l'Italie, Jean Diwo ne manque pas de décrire ce contexte historique (Cosme de Médicis, Laurent de Médicis, papes Jules II, Léon X, Clément VII...).

Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : J'ai lu
Date de parution : septembre 2011
Couverture : brochée
Format : 11 cm x 17,8 cm
Pagination : 506 pages
ISBN : 978-2-2903-0976-6

jeudi 7 février 2008

Imperium

Imperium
Auteur : Robert Harris
Traduction : Natalie Zimmermann

Texte de présentation

71 avant Jésus-Christ. Lorsque Tiron, le secrétaire particulier d'un sénateur romain, ouvre la porte à un étranger terrorisé, il déclenche une suite d'événements qui vont propulser son maître au sein d'une des plus célèbres et dramatiques affaires de l'Histoire.
L'étranger est un Sicilien victime de Gaius Verrès, gouverneur vicieux et corrompu de Sicile. Le sénateur en question, c'est Cicéron, un jeune et brillant avocat déterminé à atteindre l'imperium – pouvoir suprême au sein de l'État.
À travers la voix captivante de Tiron, nous sommes plongés dans l'univers perfide et violent de la politique romaine, et nous suivons un homme – intelligent, sensible, mais aussi arrogant et roublard – dans sa lutte pour accéder au sommet.

Mon avis : Coup de coeur !

Ayant un attrait particulier pour la Rome antique, je cherchais un peu désespérément un bon roman historique consacré à cette période. Car j'en ai lu beaucoup et la production éditoriale en la matière n'est pas pléthorique.
Pour moi, la période de la République romaine, et plus particulièrement celle de Cicéron, reste un peu floue et aride (en revanche, "du Auguste", j'en ai dégusté à l'université !). Robert Harris arrive à rendre vivante cette période et à nous passionner pour l'histoire de Cicéron. Lire une biographie de Cicéron ne faisait vraiment pas partie de mes projets et ce roman m'a permis de mieux comprendre les enjeux de cette époque et de mieux connaître ce grand personnage. C'est passionnant et je n'ai pas pu m'empêcher de faire des rapprochements avec certains événements politiques contemporains ! Une fois que vous aurez lu ce roman, Cicéron deviendra davantage pour vous qu'un simple nom. Un excellent thriller politique !
Si ce roman vous a plu, je vous conseille d'enchaîner avec la suite : Conspirata.

Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : Pocket
Date de parution : février 2008
Couverture : brochée
Format : 10,8 cm x 17,7 cm
Pagination : 480 pages
ISBN : 978-2-2661-7406-0

mercredi 24 janvier 2007

L'enquête de Lucius Valerius Priscus

L'enquête de Lucius Valerius Priscus
Auteur : Christian Goudineau

Texte de présentation

En 21 après Jésus-Christ, sous le règne de l'empereur Tibère, une révolte secoua plusieurs cités de Gaule. De grands peuples comme les Éduens, les plus anciens alliés de Rome, prirent les armes à l'instigation d'un chef énigmatique, Sacrovir. Les légions romaines réprimèrent la rébellion.
Peu après, sur instruction de l'empereur, le chevalier Lucius Valérius Priscus fut chargé d'une enquête sur cette révolte. Un manuscrit retrouvé à Alexandrie relate ses investigations...
Trois générations après la conquête de Jules César, voici le tableau d'une Gaule en pleine mutation, où le monde celte se romanise. Quelles raisons ont suscité la révolte ? La nostalgie du passé, le poids du nouvel ordre ou un complot organisé dans les plus hautes sphères de l'empire ?

Prix du roman historique des Rendez-vous de l'histoire de Blois 2005.

Mon avis : Coup de coeur !

Un auteur qui possède de solides références !
Ce roman historique démarre par un étonnant prologue au XXIe siècle en Égypte, qui m'a surprise car je m'attendais à plonger immédiatement dans la Gaule romaine ! Au point que j'ai refermé le livre pour vérifier que j'avais le bon livre entre les mains ! Faisant confiance à Christian Goudineau, éminent archéologue et professeur honoraire au Collège de France (titulaire de la chaire des Antiquités nationales), je me suis replongée dans ce roman : un manuscrit datant du Ier siècle est retrouvé dans une réserve d'objets anciens volés ou issus de pillages à l'occasion d'une enquête liée à un meurtre. C'est le professeur Ihsan Idris, plutôt original, qui va se charger de la traduction. Les volumina retrouvés concernent des événements qui se sont produits en Gaule, en 21 après Jésus-Christ. Ils contiennent la relation d'un certain Lucius Valérius Priscus que Séjan, préfet du prétoire sous le règne de Tibère, a envoyé enquêter après coup sur une révolte survenue en Gaule, à cause du poids des impôts, et vite réprimée après l'intervention des légions romaines, et la mort des chefs gaulois impliqués. Accompagné d'Egnatius, un esclave de Séjan, et bien sûr de soldats, muni de pleins pouvoirs pour mener à bien sa mission, il s'arrête dans ce but à Lugdunum (Lyon) puis à Augustodunum (Autun) et ses environs...

Un bon équilibre entre la fiction romanesque et les faits historiques
Christian Goudineau est parti d'un fait historique – cette révolte – relaté par Tacite dans ses Annales pour écrire ce roman qui nous présente une Gaule romanisée en pleine mutation entre son passé celte et son avenir gallo-romain. Alliant habilement intrigue et érudition, l'auteur parvient à intégrer subtilement des informations historiques à son récit tout en maintenant le rythme (notamment grâce aux dialogues et les pointes d'humour) et un suspense incroyable !

Du suspense et une fin inattendue...
L'intrigue, qui se développe au fil des découvertes du héros, est passionnante : trahisons, secrets d'État, manipulations, complots... Le tout est rythmé par de multiples rebondissements et de déroutants renversements de situations (jusqu'à la dernière page !). Je n'ai pas réussi à lâcher ce livre avant d'en connaître la fin, pour le moins étonnante !

Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : Babel
Date de parution : janvier 2007
Couverture : brochée
Format : 11 cm x 17,6 cm
Pagination : 336 pages
ISBN : 978-2-7427-6533-1

mercredi 4 janvier 2006

La course du hanneton dans une ville détruite

La course du hanneton dans une ville détruite
Auteur : Pierre Siniac

Texte de présentation

Elle s'appelait Barbara Rousset. Une Lorraine. On se souvient de son arrivée en Normandie, en juin 1940, au milieu d'autres réfugiés : une jeune femme de petite taille, vêtue plus que simplement. Placée chez le comte d'Auvarqueville dans le Cotentin, elle devint bientôt la marraine des huit orphelins recueillis par son maître.
Mais en juillet 1944, les vivres viennent à manquer. Se retrouvant seule avec sa bande de gosses affamés, Barbara décide d'aller chercher elle-même du ravitaillement. Au volant de la Delage du comte, son odyssée se transforme bientôt en cauchemar, dans les décombres de Saint-Lô, ville martyre où les combats continuent de faire rage...
Reconstituée à partir des témoignages de prisonniers allemands, de soldats américains et d'habitants de la région, l'incroyable histoire de Barbara finit par arriver aux oreilles de Pierre Siniac.

Mon avis : Coup de coeur !


Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : Rivages
Collection : Rivages noir
Date de parution : janvier 2006
Couverture : brochée
Format : 11 cm x 17 cm
Pagination : 288 pages
ISBN : 978-2-7436-1480-5

mercredi 13 avril 2005

La course à l'abîme

La course à l'abîme
Auteur : Dominique Fernandez

Texte de présentation

Rome, 1600. Un jeune peintre inconnu débarque dans la capitale et, en quelques tableaux d'une puissance et d'un érotisme inouïs, révolutionne la peinture. Réalisme, cruauté, clair-obscur : il bouscule 300 ans de tradition artistique.
Les cardinaux le protègent, les princes le courtisent. Il devient, sous le pseudonyme de Caravage, le peintre officiel de l'Église. Mais voilà : c'est un marginal-né, un violent, un asocial, l'idée même de "faire carrière" lui répugne. Au mépris des lois, il aime à la passion les garçons, surtout les mauvais garçons, les voyous. Il aime se bagarrer, aussi habile à l'épée que virtuose du pinceau.
Condamné à mort pour avoir tué un homme, il s'enfuit, erre entre Naples, Malte, la Sicile, provoque de nouveaux scandales, meurt à 38 ans sur une plage au nord de Rome. Assassiné ? Sans doute. Par qui ? On ne sait. Pourquoi ? Tout est mystérieux dans cette vie et dans cette mort.
Il fallait un romancier pour ressusciter, outre cette époque fabuleuse de la Rome baroque, un tempérament hors normes sur lequel on ne sait rien de sûr, sauf qu'il a été un génie absolu, un des plus grands peintres de tous les temps.

Mon avis : Coup de coeur !


Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : Le Livre de poche
Date de parution : avril 2005
Couverture : brochée
Format : 11 cm x 18 cm
Pagination : 800 pages
ISBN : 978-2-2531-1275-4

Livre numérique

Éditeur : Grasset
Format : 7switch : ePub –– Amazon : Kindle –– Decitre : ePub –– ePagine : ePub –– Fnac : ePub –– Numilog : ePub

jeudi 6 janvier 2005

Le roman d'Alexandre le Grand

Le roman d'Alexandre le Grand
Auteur : Valerio Manfredi
Traduction : Claire Bonnefous

Texte de présentation

Qui était le jeune roi macédonien qui, au IVe siècle avant Jésus-Christ, conçut le dessein de conquérir le monde entier, pour ensuite mourir comme le Christ à l'âge de 33 ans ?
Ce roman nous parle d'un homme qui fut considéré comme un dieu par ses contemporains, de ses rêves ardents, des passions violentes qui le consumèrent et finirent par le détruire. Il nous parle du père d'Alexandre, Philippe de Macédoine, mystérieusement assassiné et jamais vengé ; de sa mère, Olympias, capable de fureurs barbares, initiée aux pratiques des cultes secrets d'Orphée et de Dionysos. Il nous parle d'un jeune homme fougueux, d'une beauté et d'une intelligence exceptionnelles, qui apprit le maniement des armes et l'équitation, la peinture et la musique, et auquel son précepteur Aristote enseigna l'éducation politique et philosophique. Il nous parle de son courage et de son audace, de sa conquête de l'Asie à la tête d'une immense armée, de son avancée vers Persépolis avec la volonté d'établir un monde sans Grecs et sans Barbares et de créer une seule patrie pour un seul peuple.

Mon avis : Coup de coeur !


Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : Plon
Date de parution : janvier 2005
Couverture : brochée
Format : 13 cm x 20 cm
Pagination : 1047 pages
ISBN : 978-2-2592-0178-0

mardi 4 avril 2000

La cliente

La cliente
Auteur : Pierre Assouline

Texte de présentation

En poursuivant des recherches sur la vie d'un écrivain, un biographe découvre par hasard des milliers de lettres de dénonciation. Écrites sous l'Occupation, elles sont en principe inconsultables. L'une d'entre elles concerne l'un de ses propres amis, un commerçant dont la famille avait été déportée. Qui a fait cela et pour obéir à quel instinct ?
Le nom du délateur figure dans les dossiers. Son nom, mais pas ses motivations. Le coupable est quelqu'un de proche, très proche... Révéler son identité, ce serait porter le fer dans la plaie quand tant d'autres voudraient au contraire éteindre les cendres. Ce serait aussi dévoiler un secret mal enfoui au risque de réveiller de vieux démons.
Tout se joue dans une rue du XVe arrondissement de Paris entre trois magasins, un bistrot, une église et un autobus. La France en réduction concentrée sur quelques centaines de mètres de bitume. On peut tout dire, mais peut-on tout entendre ?
Méditation sur la banalité du mal, ce récit est celui d'un obsessionnel que la volonté de comprendre a failli faire basculer de l'autre côté du miroir.

En complément

  • Les éditions Gallimard ont réalisé un entretien avec Pierre Assouline à l'occasion de la parution de La Cliente.

Mon avis : Coup de coeur !

L'histoire
Le narrateur, biographe, entreprend de rédiger un livre sur la vie d'un écrivain, Désiré Simon. Lors de la lecture de ses Mémoires, il découvre que celui-ci aurait été accusé en 1941 d'avoir des origines juives : "On lui demandait de prouver non ce qu'il était mais ce qu'il n'était pas".
Souhaitant faire toute la lumière sur cette information, il obtient l'autorisation du ministère de la Culture de consulter à titre exceptionnel les archives de l'Occupation et se met alors à éplucher les rapports de police, les dossiers des renseignements généraux, les listes confidentielles, les milliers de lettres de dénonciation, et cela jusqu'à la nausée.

Sa recherche va aboutir à une autre découverte, bien plus terrible et lourde de conséquences pour le narrateur : il met la main sur une lettre dénonçant la famille de son ami François, les Fechner, cousins germains de sa femme. Seul Henri, le père de François, a survécu et a pu récupérer ses biens à la Libération.
Après avoir consulté une quantité astronomique de dossiers, le narrateur parvient à retracer l'histoire de cette famille et à identifier l'auteur de cette dénonciation. Fourreur de père en fils depuis des générations, cette famille juive originaire d'Europe de l'Est habitait à Paris, dans le XVe arrondissement. Victime de l'aryanisation de son magasin rue de la Convention, elle avait ouvert un atelier clandestin rue Lecourbe. Mais, un jour, un certain Chifflet, inspecteur au Service de contrôle des administrateurs provisoires, sonne à leur porte en donnant le nom d'une de leurs clientes.
C'est le début de la fin : l'enquête débouche sur l'arrestation et la déportation des Fechner. Et cette cliente n'était autre que Cécile Armand-Cavelli, la fleuriste qui se trouve aujourd'hui encore juste en face de leur magasin, rue de la Convention !
Si François parvient à tourner la page pour protéger son père et le soustraire de ce passé douloureux, le narrateur n'y parvient pas. Hanté et écoeuré par sa découverte, il veut savoir pourquoi cette femme a dénoncé cette famille, et tous les moyens seront bons pour obtenir une réponse...
"Après ton appel, j'étais fou de rage. Je suis entré dans son magasin. Elle était seule. Je l'aurais volontiers étranglée. Je suppose que ça se voyait. Au lieu de quoi, je l'ai fixée en silence droit dans les yeux pendant des minutes qui ont dû lui paraître des siècles. Au début, elle a fait l'étonnée. Mais au fur et à mesure de l'épreuve, elle s'est défaite. J'ai lu sa vie dans son regard. J'y ai vu son crime. Puis elle a baissé les yeux. (…) Maintenant, elle sait que je sais. En ne se délivrant pas de sa faute, cette femme s'est obligée à vivre avec jusqu'à sa mort. La faute ou l'offense, appelle ça comme tu veux. Son esprit sera toujours moins en repos que le mien. Elle porte son châtiment en elle. Pour moi, c'est fini."

La délation sous l'Occupation
Le système de délation nous est présenté ici par le biais, original, de la recherche d'un biographe dans les archives. C'est en sa compagnie que nous découvrons au fur et à mesure et de manière crescendo ces innombrables lettres de dénonciation et leur contenu. Il est impossible de savoir le nombre de lettres qui ont été écrites, mais tout le monde pouvait en être victime :
"C'était le mari trompé qui trahissait sa femme au coeur innombrable, la maîtresse délaissé son amant trop volage, l'ami floué son associé duplice, le père de la fiancée son futur gendre indésirable. Cela s'est passé entre Français. Des chrétiens ont fait ça à des Juifs. Mais des Juifs se sont également fait ça entre eux."
Au-delà de ces lettres, c'est également l'attitude de l'administration française qui est soulignée dans ce roman via le personnage de Robert Chifflet. En parlant des fonctionnaires, le narrateur explique que "Ces gens-là sont les pires parce qu'ils sont beaucoup plus répandus, plus invisibles, plus nocifs que les vrais monstres. Ils ont leur morale en devanture, le sens du devoir en bandoulière, et le service de l'État en parapluie."

Dans un cas comme dans l'autre – délation et comportement de l'administration française –, ces informations nous sont délivrées de manière subjective par un narrateur qui est totalement imprégné de cette période et visiblement insuffisamment armé psychologiquement pour faire face aux horreurs qu'il découvre :
"Les années quarante m'étaient devenues une seconde patrie. Mon pays d'adoption en quelque sorte. Mais je ne l'habitais pas, c'est lui qui m'habitait. L'Occupation m'avait pénétré. Je n'étais plus un homme, j'étais une guerre civile."
"Plus que jamais la guerre était en moi. Je respirais l'air du temps de l'Occupation. Personne ne pouvait accéder à ce désarroi, rien n'était en mesure de l'atténuer. J'assistais impuissant au lent grignotage de mon esprit par un corps étranger."
Incapable d'avoir le moindre recul et la moindre analyse historique, le narrateur absorbe tous ces documents jusqu'à la nausée, comme il le dit lui-même, et ne parvient pas à avoir une vision globale et objective de la France sous l'Occupation. Et c'est bien là l'une des difficultés du travail de l'historien, surtout quand cela concerne cette période si complexe de l'Occupation. Ainsi, n'oublions pas que beaucoup de fonctionnaires ont poursuivi leur travail de sein de l'administration française sous l'Occupation en tant que résistants, permettant ainsi de sauver de nombreuses vies humaines.
"Plus je m'enfonçais dans le maquis des archives, plus je m'apercevais que les années noires avaient été grises. Elles n'étaient qu'ambiguïté et compromis. Elles avaient la couleur du flou."
Ce roman nous donne ainsi une vision subjective et partielle de l'Occupation, mais ce point de vue se justifie puisqu'il s'agit bien d'un roman et non d'un livre d'histoire et que l'intrigue est menée par un narrateur-héros psychologiquement fragile. Le mode de narration amplifiant notre propension à nous identifier à ce narrateur, on pourrait avoir tendance à adopter la vision très noire de ce dernier. Gardons-nous en et n'hésitons pas à visionner des documentaires et à lire des livres d'histoire pour se faire une opinion plus nuancée de cette période.
"Jamais un historien ne pourra donner la vraie mesure du phénomène. Seul un romancier y parviendrait. Ou un psychiatre. Nul besoin de se sentir une vocation de proctologue pour fouiller le cul du monde.
Si cela n'avait été que haineux, ce serait simple. Mais lorsque le mal s'exprimait dans toute sa banalité, lorsqu'il apparaissait profondément ordinaire, la raison déposait les armes. Car, avec l'Occupation, on n'est plus dans la politique. Pendant quatre ans, ce fut à chaque heure l'heure de vérité qui révéla la part d'humain ou d'inhumain en nous."

Un acharnement effroyable
Le narrateur est le personnage principal de ce roman, mais il ne possède ni nom ni histoire. L'on sait juste que c'est un homme et qu'il est biographe. Un personnage suffisamment neutre pour que tout un chacun puisse s'identifier à lui.
Le lecteur est ainsi immédiatement plongé dans cette histoire terrible aux côtés du biographe, partageant ses pensées, ses émotions, ses hésitations, ses hallucinations, ses joies, ses doutes, ses souffrances... Ce point de vue unique nous conduit à ne connaître les pensées des autres personnages que par le prisme du narrateur qui entre rapidement dans une spirale infernale dont on aimerait lui dire qu'elle va le conduire à commettre une erreur, comme tentent de lui faire comprendre successivement plusieurs personnages du roman (François Frehner, Henri Frehner, monsieur Adret, les personnages du bus...), mais non, le narrateur s'est lancé dans une course folle et il ne connaîtra de répit que lorsqu'il connaîtra la vérité. Le narrateur a beau expliquer qu'il cherche à comprendre et non à venger la famille de son ami, sa quête de vérité va le conduire à se perdre lui-même et à frôler la folie, perdant le sommeil, ne pensant plus qu'à cette femme, à ce qu'elle a fait. Elle ne répond pas à ses questions ? Tant pis pour elle, de justicier, il devient bourreau, la harcelant de jour comme de nuit (appels et lettres anonymes, filatures...). Et elle, de bourreau, elle devient la victime. Certainement non préparé et traumatisé par la découverte des archives de l'Occupation, le choc subi par le narrateur a été décuplé lorsqu'il a appris que la famille de son ami avait elle-même été victime de cette délation. Perdant tous ses repères, toutes ses valeurs, le narrateur n'a plus qu'un but : comprendre devient son idée fixe, son obsession.
Même si le narrateur devient très vite inquiétant de par son caractère obsessionnel et paranoïaque, le lecteur ne peut s'empêcher de le suivre, totalement aspiré par cette histoire, ne parvenant pas à lâcher ce roman et souhaitant connaître la vérité et avoir la réponse : pourquoi ? Le suspense va grandissant, rythmé par une écriture légère et fluide alternant narration et dialogues, et ce n'est qu'à la fin du roman, après une quête effrénée et complètement folle, que nous reprenons notre souffle et découvrons la vérité...

Un dénouement extrêmement fort
La vérité, la voici enfin, inattendue, puissante, émouvante, dramatique... Elle nous laisse hébétés, remplis d'effroi et d'émotions. Qu'en est-il du narrateur ? Il disparaît soudainement, nous laissant seuls avec nos sentiments contradictoires. On le retrouve dans le dernier chapitre, quelque temps plus tard, mais il reste très pudique sur cette histoire et ses répercussions. Certes, l'on comprend qu'il en a tiré des leçons, mais pas assez à mon goût compte tenu du dénouement. Mais faut-il se flageller éternellement comme fut tentée de le faire Cécile Armand-Cavelli ? Non, et le narrateur l'a bien compris. Conscient de ses erreurs passées, il ne les oublie pas mais s'en sert pour avancer et vivre au présent.

Une leçon de prudence et de sagesse
Ce roman pose beaucoup de questions au lecteur : peut-on vivre avec le poids de la culpabilité ? Et, si oui, comment ? Peut-on juger des personnes et des actes commis lors d'une époque que l'on n'a pas connue ? Avons-nous le droit et les capacités d'apporter un jugement moral sur une époque aussi complexe ? Qu'aurions-nous fait à la place des personnages ? La fin justifie-t-elle les moyens ?...
Pierre Assouline décrit brillamment comment l'ignorance et les préjugés peuvent conduire à de terribles erreurs. Il nous met en garde contre les jugements expéditifs : la vérité n'est pas toujours celle qu'on croit... Ne jugeons pas trop vite.

Un roman bouleversant, profondément humain et écrit avec force et sensibilité.

Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : Folio
Date de parution : avril 2000
Couverture : brochée
Format : 11 cm x 17,8 cm
Pagination : 192 pages
ISBN : 978-2-0704-1274-7