Les enquêtes d'Hippolyte Salvignac. Tome 2 : Le faubourg des diaboliques

Auteur : Philippe Grandcoing

Texte de présentation

Paris, printemps 1907 : dans une France en plein bouleversement, l'antiquaire et enquêteur Hippolyte Salvignac est de retour !
Accusé d'avoir assassiné le mari de son ancienne maîtresse, il devra batailler pour prouver son innocence, mais aussi pour disculper un ami de Picasso. Ces nouvelles aventures le conduisent du Paris interlope de Montmartre, berceau des avant-gardes artistiques, aux hôtels particuliers du faubourg Saint-Germain. Menant en parallèle la quête des origines familiales de son ami l'inspecteur Lerouet, il plonge au plus profond des turpitudes des élites. Le voilà sillonnant un pays aux puissants contrastes : Sologne des chaumières et des châteaux, terroirs traditionnels du Quercy, Midi languedocien ravagé par la crise viticole...
Alliant la qualité de la documentation et un réel sens de l'intrigue, Philippe Grandcoing fait revivre un moment d'une extraordinaire intensité, où se forge avec fracas la modernité du XXe siècle, celles des Demoiselles d'Avignon mais aussi celles d'une économie déjà mondialisée et d'une démocratie confrontée aux colères populaires. autant de défis pour les figues historiques croisées au fil de ces pages captivantes, de Clemenceau à Picasso, en passant par Derain et Apollinaire.

Mon avis : Bien

Le faubourg des diaboliques, deuxième tome de la série "Les enquêtes d'Hippolyte Salvignac", nous plonge de nouveau dans la France du début du XXe siècle, une période tourbillonnante et riche sur tous les plans, politique, économique, scientifique, social, religieux, etc.
1907, Paris. Nous retrouvons notre héros antiquaire, Hippolyte Salvignac, qui, après avoir résolu une affaire de trafic d'oeuvres d'art dans le premier tome, se retrouve ici accusé d'avoir assassiné le mari de son ancienne maîtresse, qu'il a quittée il y a de cela quelques mois. Malgré ses liens privilégiés avec Georges Clemenceau – Hippolyte mène des enquêtes pour lui à titre officieux –, il aura bien du mal dans un premier temps à démontrer son innocence. Heureusement, il pourra compter sur l'aide de son ami, l'inspecteur Louis Lerouet. Mais il se donnera ensuite pour mission, par ricochet, de prouver l'absence d'implication d'un proche de Pablo Picasso dans cet assassinat. En parallèle, il tentera de découvrir l'identité du père biologique de Louis Lerouet.

Une plongée passionnante dans la France du début du XXe siècle

Situées entre Paris, la Sologne, le Quercy et le Languedoc, ces différentes enquêtes nous permettent de voyager à travers la France et de découvrir des paysages, des traditions et des personnages hauts en couleur, issus d'une période qui nous semble lointaine alors qu'elle ne l'est pas tant que cela. Une centaine d'années, qu'est-ce à l'échelle de l'humanité ? Pourtant, si vous regardez des photos de cette période, donc autour de l'année 1907, vous aurez forcément l'impression de voir un autre monde, un monde qui a disparu. Pour un auteur, il y aurait ainsi facilement de quoi se noyer dans les descriptions interminables d'une période révolue. Mais Philippe Grandcoing, historien spécialiste des XIXe et XXe siècles, a de nouveau réussi à nous plonger dans cette période ô combien complexe sans nous assommer de détails, et ce grâce à son écriture fluide, précise et très visuelle, bien rythmée, lui permettant en peu de mots de mettre en place un décor, un lieu, une atmosphère, un personnage.
Ainsi tout en suivant ces deux enquêtes, nous avons le plaisir de découvrir plein de petites infos sur le contexte social et politique, le monde de la prostitution, les mœurs de l'époque, le statut des femmes, etc. Je retiens, côté découverte, cette crise viticole dans le sud de la France dont j'ignorais tout et qui, pourtant, a eu un fort retentissement à l'époque. Et je ne suis pas restée de marbre en lisant les lignes consacrées à cette pauvre Adélaïde, qui est littéralement "fliquée" par ses cousins... Nous sommes en 1907, les femmes n'ont pas encore le droit de vivre comme elles le souhaitent, pas même de refaire librement leur vie...

Mais, surtout, j'ai beaucoup aimé les passages liés à l'évocation du monde artistique et donc des avant-gardes, que ce soit dans le domaine pictural ou littéraire. On y découvre des artistes encore inconnus, Pablo Picasso, André Derain, Guillaume Apollinaire, Max Jacob, Juan Gris, Maurice de Vlaminck, Fernand Léger, et leurs ateliers, comme le Bateau-Lavoir. À leurs côtés, on déambule dans les rues de Montmartre et on assiste à leurs discussions et parfois à leurs disputes. Les personnages sont bien décrits, avec leurs forces et leurs faiblesses. C'est là qu'Hippolyte découvre, à travers ces différents artistes, l'art africain qui a été une source d'inspiration importante pour Pablo Picasso, par exemple, notamment pour ses fameuses Demoiselles d'Avignon dont il est question dans ce roman, et les échanges autour de cette œuvre sont vraiment savoureux !

Quid de l'intrigue ?

Là où le bât blesse, c'est le titre du roman et l'intrigue. Au terme de ma lecture, je n'ai toujours pas compris pourquoi ce roman portrait ce titre, j'ignore qui sont ces "diaboliques" et il n'est nul question de "faubourg" dans ce roman. Avec un tel titre, je m'attendais à une intrigue plus sanglante, plus mystérieuse, mettant notre héros aux prises avec une société secrète !

Quant à l'intrigue, on pourrait croire à la lecture du résumé qu'elle va être forte et complexe. En réalité, il n'y a pas vraiment d'intrigue ou, plutôt, il y a deux petites intrigues, mais peu consistantes, à tel point que j'ai vite fini par les oublier pour ne m'intéresser véritablement qu'à l'évocation réussie et passionnante de cette France du début du XXe siècle. Pourtant, au départ, l'intrigue démarre plutôt sur les chapeaux de roue puisque c'est Hippolyte lui-même qui est accusé, faisant les frais d'un conflit larvé entre policiers pro et anti républicains. C'est pour nous l'occasion de pénétrer au coeur du fameux Quai des Orfèvres et même dans ses cellules ! Le suspense se maintient durant quelques chapitres, mettant un peu nos nerfs à rude épreuve car on se demande vraiment si Hippolyte va s'en sortir. Seul l'inspecteur Louis Lerouet semble vouloir l'aider et c'est d'ailleurs grâce à lui qu'il est innocenté.
Ensuite cette intrigue se poursuit en pointillé par le biais d'un autre personnage accusé et se superpose avec une autre enquête sans aucun lien avec la précédente et sans aucun danger, mais qui a le mérite de mettre en lumière les failles de la petite bourgeoisie de province, hypocrite et soucieuse du qu'en-dira-t-on.
En fait, dans un roman policier, l'auteur s'appuie en général sur un contexte historique pour mettre en place son intrigue. Là, nous nous trouvons dans le schéma inverse : les intrigues servent d'ossature aux descriptions du contexte historique, social, artistique, etc. Le terme d'"enquête" laisse vraiment entendre qu'il s'agit d'un roman policier, ce qui fut le cas avec le premier tome de cette série, d'où mon étonnement.

Cependant, malgré ce petit décalage dans le genre littéraire, il faut reconnaître le grand talent de l'auteur dans la retranscription de l'atmosphère qui règne à Paris et en province en ce début de XXe siècle ; il parvient en peu de mots à nous donner, sans qu'on s'en rende compte, une multitude d'informations et de détails sur la vie d'alors. C'est là la grande force de ce roman.

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En conclusion

Points forts :

• Une description passionnante et parfaitement documentée, à la fois sensible et précise, de la vie au début du XXe siècle, c'est-à-dire à la Belle Époque, période rarement abordée dans les romans historiques.
• Au-delà des grands événements historiques, une évocation d'un fait moins connu du grand public : la révolte des vignerons du Languedoc.
• Un roman qui se déroule à Paris mais aussi en province, nous permettant d'avoir un aperçu plus juste de la vie quotidienne d'un Français en 1907.
• La description du monde artistique d'alors et de ses principaux représentants, et du processus de création : Picasso, Derain, Apollinaire...

Points faibles :

• Un titre dont le rapport avec le contenu du livre reste pour moi mystérieux.
• Un petit "malentendu" sur le genre littéraire : le roman historique l'emporte largement sur le roman policier, alors que je m'attendais à une véritable enquête policière.
• La présence malgré tout d'une intrigue, mais qui repose en fait sur deux enquêtes peu consistantes.

L'avis des blogueurs

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Caractéristiques techniques

Livre papier

Éditeur : De Borée
Date de parution : mars 2020
Couverture : brochée
Format : 10,9 cm x 17,8 cm
Pagination : 448 pages
ISBN : 978-2-8129-3190-1

Livre numérique

Éditeur : De Borée
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